
J'ai à coeur de présenter un album qui reste assez méconnu, dont j'imagine que peu d'entre vous aimeront, assez logique vu l'absence de compromis, et la radicalité artistique qu'il représente.
Pour moi ça n'a pas été un virage musical, juste une porte qui s'est ouverte sur un autre aspect de la musique, c'est l'album qui m'a ouvert à la musique improvisée, au post rock, au SILENCE. C'est mon père qui me l'a mis entre les oreilles, il y a une dizaine d'années, rejet total au départ, puis séduit, puis conquis, puis recherche de l'histoire du groupe, de l'album, du pourquoi, du comment, et découverte de Mark Hollis que je considère comme un artiste majeur.
Cet album c'est "Spirit of eden", de Talk talk, dont on connait quelques tubes des années 80, bien loin de la musique dont je vais parler.
Quatrième album du groupe, Spirit of eden sort en 1988. Tiraillés par le succes qu'ils connaissent avec leur chansons formatées, Mark Hollis et Tim Greene décident de changer totalement de visage, et revenir ce vers quoi ils ont toujours voulu être, artistiquement parlant.
Ce qui interpelle aux premières écoutes, c'est le dépouillement extrême, la mise à nu de leur musique, un volte face total à leur passé, audacieux mais suicidaire.
La presse musicale adore, le public boude, la maison de disque fait la gueule et rompt les contrats, préférant réediter les anciens tubes.
Alors "spirit of eden" c'est quoi ? c'est un kit jazz, des cordes, des cuivres, harmonica, basson, trompette, et du silence.... pour la plupart en improvisation, et avec une pointe assumée de mélancolie.
Le travail sur les textures et les sons est ahurissant, on est dans la délicatesse, j'ai lu une fois un article où l'auteur disait que "Spirit of Eden est une toile pointilliste où quelques touches suffisent à occuper l’espace. Une musique qui semble en être restée au stade permanent de l’esquisse, de l’effleurement."
c'est je pense l'une des meilleures description que l'on pourrait en faire.
On parle alors d'ivresse par le vide, de musique du silence, ça peut déstabiliser, ça peut irriter, mais ça peut aussi fasciner et émouvoir.
L'album comporte 6 titres, qui s'enchainent sans réelle distinction, avec tous en commun ce sens du minimalisme, du son idéal, de la couleur parfaite, qui atteint son paroxysme pour le dernier titre "wealth" dont la voix, la contrebasse et quelques accords sont les uniques représentants.
1) The Rainbow
2) Eden
3) Desire
4) Inheritance
5) I believe in you
6) Wealth
Concernant la batterie, elle est quasi inexistante, donc essentielle, le batteur Lee Harris a la même démarche que le groupe, intervenir lorsque c'est nécessaire, chercher les sons, les textures, se fondre dans la musique.
Très difficile de décrire un tel album, surtout lorsqu'il vous tient tant à coeur (je ne suis pas doué pour ça), Talk Talk sortira un an plus tard "Laughing stock" ( dont j'ai parlé un peu plus bas et plus brièvement), qui continue cette aventure, et va même encore plus loin.
Je ne sais pas si ça intéressera grand monde ici, en tous cas si ça vous intéresse vous pouvez sur le net trouver des articles qui vantent bien mieux que moi toutes les richesses de cet album.